Je me sens honteuse d’avoir ce qu’il faut chez moi, même si les fins de mois sont dures. J’ai chaud et toujours le ventre plein lorsque je vais me coucher. La question de savoir si j’aurai de quoi nourrir mes enfants demain ne se pose pas encore. Alors imaginer cette personne assise par terre, angoissée de ne pas pouvoir nourrir ses enfants, l’idée m’est insupportable.
Je me souviens de ma mère donnant un sac de courses plutôt que de l’argent. J’étais rassurée de savoir que cette personne aurait de quoi manger.
Mais aujourd’hui, j’ai eu honte, je n’ai pas pu aider cet homme.
Les gens qui mendient dans les trains en laissant des mots sur les sièges me mettent mal à l’aise. J’imagine la difficulté qu’ils rencontrent pour faire face à tous ces inconnus et admettre qu’ils n’arrivent pas à joindre les deux bouts. L’atteinte dans leur estime personnelle…
Et puis, aujourd’hui, j’ai vu cette homme. Il déposait des petits paquets avec quelques fournitures dedans. Des sachets bien propres, fait minutieusement, qu’il vendait 3 euros ou un ticket restaurant.
Mais je n’avais même pas un euro sur moi…
Cet homme est sourd, son handicape l’empêche de trouver une situation stable pour l’instant. Cela m’a émue, j’avais mon bébé dans les bras, j’ai pensé à mon neveu qui lui aussi va devenir sourd… J’ai vu ce dont sa mère a si peur. J’ai eu mal pour cet homme qui admettait toutes ses faiblesses devant nous, le regard fuyant. Il essaie de gagner sa vie avec toute la dignité possible.
J’ai eu honte de ne rien lui donner, même pas une pièce.
Aujourd’hui, j’aurais voulu récompenser ses efforts, lui montrer mon soutien. Mais je n’ai pas pu. Je n’ai même pas osé le regarder tellement j’avais honte de moi. J’ai serré ma fille et les larmes ont coulé…
Aujourd’hui, je n’ai pas pu aider quelqu’un dans le besoin...
