Comme le disait Victor Hugo, la mélancolie, c'est le bonheur d'être triste. Cela n'a jamais été aussi vrai qu'avec la musique de Lana Del Rey. Quand je l'écoute, l'adolescente à fleur de peau qui marquait le nom de son amoureux à l'infini sur ses cahiers d'école me titille toujours un peu, je me dis aussi que oui, le monde est décidément trop cruel, mais Dieu que c'est bon.
Après avoir menacé d'arrêter la musique fin 2012, Lana semble avoir finalement changé d'avis et nous est revenue le 13 juin dernier avec un nouvel album, Ultraviolence, produit par Dan Auerbach, le chanteur et guitariste des Black Keys.
Un nouvel opus moins accessible
J'avais été si envoûtée par Born to die – que j'écoute toujours en boucle – que j'appréhendais un peu la découverte d'Ultraviolence. Difficile en effet de maintenir un tel niveau quand on a démarré au sommet. Contrairement à son prédécesseur, la première écoute s'est avérée moins évidente, les morceaux moins faciles d'accès et le coup de foudre n'a pas été immédiat.
Le côté pop et hip-hop a disparu au profit d'un rock d'inspiration seventies où plane le fantôme des Eagles. Lana, qui s'était elle-même définie comme une Nancy Sinatra gangsta, a laissé son côté gangsta au vestiaire, l'album flirtant beaucoup plus avec les guitares, tantôt douces comme dans Blooklyn Baby, tantôt plus violentes et saturées comme dans Shades of Cool ou Pretty when you cry.
Sa voix a perdu ses envolées enfantines pour se faire plus profonde et plus intime, plus troublante aussi, jusqu'à une interprétation étonnamment classique, et par conséquent déroutante, du dernier morceau de l'album.
Mais Lana reste Lana
Cette nouvelle direction artistique et cette coloration musicale plus rock, à laquelle Dan Auerbach n'est bien sûr pas étranger, ne trahissent en rien l'univers de Lana Del Rey. Bien au contraire, les rythmes lancinants et lascifs et les sonorités vintage servent à merveille sa mélancolie fantasmatique et sa nostalgie douloureuse. Dans les textes, les filles fragiles tombent toujours amoureuses des bad boys et aiment toujours flirter avec la mort. Et Lana reste plus que jamais dans son personnage, entre star irréelle tout droit sortie de l'âge d'or hollywoodien et icône résolument moderne.
Plus qu'un album, un voyage
La première impression laissée par Ultraviolence est celle d'un long morceau qui n'en finit pas. Ce n'est qu'après plusieurs plongées que les nuances se font jour, que l'univers se dévoile et que l'on est définitivement conquis par la grande cohérence artistique de l'ensemble. Il est de ces amours qui demandent de la persévérance avant de se révéler. Ainsi, Ultraviolence n'est pas une boîte à tubes comme pouvait l'être Born to die, ni seulement l'album d'une artiste tour à tour décriée et adulée, c'est avant tout un voyage musical à ne pas manquer.