Depuis quelques jours, le monde médiatique est en ébullition. Thomas Legrand et Patrick Cohen, deux figures bien connues du service public, se retrouvent au centre d’une polémique d’ampleur nationale après la diffusion de vidéos compromettantes. Face à cette situation, l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, a décidé d’auditionner Delphine Ernotte Cunci (présidente de France Télévisions) et Sibyle Veil (présidente de Radio France).
L’affaire interroge profondément sur les notions d’impartialité et d’éthique journalistique, et pourrait laisser des traces durables dans la confiance du public envers les médias.
Une vidéo qui fait scandale
Tout a commencé le 5 septembre 2025, lorsque le média conservateur L’Incorrect publie une séquence filmée en juillet dans un restaurant parisien. On y voit Thomas Legrand, chroniqueur à Libération et France Inter, et Patrick Cohen, intervenant régulier sur France Inter et C à vous (France 5), en pleine discussion avec Pierre Jouvet, secrétaire général du Parti socialiste, et Luc Broussy, président du conseil national du PS.
L’échange aborde la stratégie de la gauche en vue de la présidentielle de 2027. Mais c’est une phrase en particulier qui déclenche la tempête : Thomas Legrand déclare, sourire aux lèvres, « Nous, on fait ce qu’il faut pour (Rachida) Dati, Patrick (Cohen) et moi ». Un propos qui, bien que prononcé dans un contexte privé, soulève immédiatement des soupçons de parti pris politique.
Une polémique aux répercussions politiques immédiates
En l’espace de quelques heures, la vidéo fait le tour des réseaux sociaux et alimente les polémiques. Les réactions politiques fusent de toutes parts :
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Les Républicains dénoncent une connivence intolérable entre journalistes du service public et leurs adversaires politiques.
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Le Rassemblement national pointe du doigt une preuve de partialité médiatique, confirmant selon eux une « bienveillance » systématique envers la gauche.
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Même du côté de La France insoumise, on critique un mélange des genres jugé dangereux pour l’indépendance du débat démocratique.
Ainsi, l’affaire dépasse très vite le cercle médiatique pour devenir un sujet politique national, mettant en cause la crédibilité des institutions audiovisuelles publiques.
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L’Arcom monte au créneau
Face à la gravité des accusations, l’Arcom a annoncé le 11 septembre qu’elle allait auditionner dans les prochains jours les dirigeantes de France Télévisions et de Radio France. L’objectif : recueillir leurs explications et leurs observations. Ces auditions, organisées à huis clos, permettront au régulateur de mieux comprendre dans quelle mesure les propos tenus en privé par ces journalistes peuvent ou non engager l’image de neutralité du service public. Au-delà de cette affaire précise, l’Arcom a rappelé qu’elle avait déjà engagé depuis plusieurs mois une réflexion plus large sur l’indépendance et l’impartialité du secteur public audiovisuel. Ce contexte renforce encore la portée symbolique de l’audition de Delphine Ernotte et Sibyle Veil.
Le comité d’éthique également saisi
En parallèle, le comité d’éthique de France Télévisions a annoncé qu’il se saisissait lui aussi du dossier. Dans un communiqué publié le 10 septembre, il explique avoir décidé de travailler sur cette affaire « compte tenu de l’ampleur de la polémique », et promet de publier prochainement son avis officiel. Une démarche qui vise à rassurer l’opinion publique et à montrer que des garde-fous existent pour garantir la déontologie au sein du service public.
Un enjeu d’image pour le service public
Cette affaire, qui pourrait sembler anecdotique au premier abord puisqu’il s’agit de propos échangés dans un cadre privé, revêt en réalité une importance capitale. Les journalistes du service public ont une mission de neutralité et se doivent de respecter un devoir d’indépendance absolue. Voir deux figures médiatiques reconnues discuter librement de stratégie politique, et laisser entendre un engagement personnel, brouille la frontière entre information et militantisme. C’est précisément cette frontière que le public exige de voir respectée pour conserver confiance dans les médias.
Pour France Télévisions et Radio France, l’enjeu est double : protéger la réputation de leurs rédactions, mais aussi réaffirmer leur attachement à une information impartiale, indépendante et équilibrée. Toute perception d’un biais politique, qu’il soit réel ou exagéré, peut avoir des conséquences durables sur leur crédibilité.
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Et maintenant ?
Les auditions à venir devant l’Arcom seront décisives. Selon leurs conclusions, l’autorité de régulation pourrait demander des garanties supplémentaires, voire imposer des mesures plus strictes en matière d’éthique journalistique. En parallèle, l’avis du comité d’éthique de France Télévisions sera scruté de près.
Cette séquence illustre à quel point l’équilibre entre liberté d’expression privée et devoir de neutralité publique est fragile pour les journalistes. Elle met aussi en lumière la défiance croissante d’une partie de l’opinion à l’égard des médias traditionnels, accusés tour à tour d’être trop proches du pouvoir ou trop engagés politiquement. L’affaire Thomas Legrand/Patrick Cohen restera sans doute comme un cas d’école sur la gestion des polémiques médiatiques à l’ère des vidéos virales et de la surveillance permanente. Reste à savoir si, après ce scandale, la confiance du public pourra être rétablie.
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