C’est une petite case que nous cochions machinalement en réservant un billet de train. “Monsieur” ou “Madame”, une formalité banale… jusqu’à ce qu’elle devienne illégale. Désormais, la SNCF n’a plus le droit de collecter cette information dans le cadre de la vente de billets. C’est le Conseil d’État qui l’a décidé ce jeudi 31 juillet 2025, suivant un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne. Explications.
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Une pratique jugée contraire au RGPD
Tout a commencé par une plainte déposée par l'association Mousse, engagée pour les droits des personnes LGBTQ+. Celle-ci dénonçait l’obligation faite par SNCF Connect, le site de réservation officiel, de sélectionner une civilité genrée pour valider l’achat d’un billet. Une obligation qui, selon l’association, allait à l’encontre du règlement général sur la protection des données (RGPD).
Après un premier rejet par la CNIL en 2021, Mousse a porté l’affaire devant le Conseil d’État, qui a saisi la CJUE pour avis. Et cette dernière a été très claire : si une donnée n’est pas essentielle à l’exécution d’un contrat, elle ne peut être collectée systématiquement.
En clair, vous n’avez pas besoin de préciser votre genre pour monter dans un train. Et la collecte d’une information personnelle dans ce seul but, même pour “personnaliser la communication commerciale”, n’est ni justifiée, ni légale.
La fin des billets de train genrés
Résultat : depuis mai 2025, SNCF Connect a discrètement supprimé toute mention obligatoire de civilité sur son site. L’affaire ne fait pourtant grand bruit que maintenant, car la décision du Conseil d’État vient officialiser cette évolution, en la justifiant juridiquement.
Il est désormais interdit à la SNCF de rendre obligatoire le choix d’un genre, sauf dans des cas très particuliers. La juridiction administrative française précise en effet que des services spécifiques, comme les compartiments couchettes réservés aux femmes, peuvent continuer à prendre en compte cette donnée. Mais cela ne justifie pas une collecte généralisée pour tous les billets.
Ce changement s’appuie sur le principe de “minimisation des données”, fondamental dans le RGPD : on ne peut pas exiger une information sans qu’elle soit strictement nécessaire à la finalité du service proposé.
Une décision saluée… et une condamnation de l’État
Dans son arrêt, le Conseil d’État souligne que la pratique de SNCF Connect “allait au-delà des limites du strict nécessaire” et condamne l’État à verser 3.000 euros à l’association Mousse en réparation.
Pour Étalab, qui supervise la transparence des données publiques, cette décision pourrait faire jurisprudence : d’autres entreprises pourraient être contraintes de revoir leurs formulaires de réservation, d’achat ou de création de compte, dès lors qu’ils incluent des mentions de civilité non essentielles.
Quant à SNCF Connect, la plateforme a expliqué dans un communiqué qu’elle se contentait d’appliquer les demandes des opérateurs ferroviaires, et qu’elle s’est adaptée “en tant que distributeur” à cette nouvelle exigence légale.
Un petit pas symbolique aux conséquences importantes
Certains verront dans cette évolution un détail technique, une modification minime dans le quotidien numérique des Français. Mais pour beaucoup, c’est un pas vers une société plus inclusive, où l’on ne présume pas de l’identité d’un usager sans raison.
Ne plus avoir à se définir comme “Monsieur” ou “Madame”, c’est aussi laisser de côté les stéréotypes, les automatismes genrés et parfois les inconforts pour les personnes non-binaires. Cela revient à considérer qu’un nom, une adresse et un moyen de paiement suffisent à faire voyager quelqu’un, sans qu’il soit nécessaire de coller une étiquette au passage.
Et ce n’est qu’un début. L’association Mousse appelle désormais toutes les plateformes de services publiques et privées à revoir leurs pratiques. D’autant plus que le RGPD est en vigueur depuis 2018 : collecter moins de données personnelles n’est pas une faveur, c’est une obligation.
En résumé
La SNCF n’a désormais plus le droit d’imposer à ses clients de préciser leur genre lors de l’achat d’un billet. Une décision de justice qui s’inscrit dans un mouvement plus large de respect de la vie privée et d’inclusion, et qui pourrait bientôt inspirer d’autres secteurs. Parce qu’après tout, qu’importe votre genre, l’important, c’est d’arriver à destination.
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