Si vous suivez mes petites aventures, vous savez que j’ai accouché d’un bébé préma et qu’il a passé le premier mois de sa vie en néonat’. Ce mois en question fut sans surprise des plus compliqués à gérer ! Gérer l’éloignement, gérer les doutes, les soucis respiratoires et cardiaques, et tout le lot d’émotions qui accompagnaient cela.
Dans ces moment-là, tu as beau tout faire pour rester forte et tenir le coup, il arrive que tu flanches et que tu n’aies qu’une envie, t’effondrer. Et c’est souvent dans ces instants de fragilité que tu croises sur ton chemin une jolie rencontre qui vient te redonner de la force.
Ces jolies rencontres, elles se font naturellement dans les couloirs du service, au gré de tes allées et venues. C’est parfois un simple sourire échangé, un bonjour enjoué, ou une discussion plus poussée.
Ce sont souvent des mamans, mais aussi des papas, qui sont là pour leur enfant avec chacun une histoire bien à eux.
Au fil des jours, tu apprends à les connaître et tu découvres leur parcours. Tu partages un bout de ton aventure avec eux. Et grâce à ces échanges, des liens se créent. Ces liens sont particuliers, forts et intenses et pourtant éphémères.
Nous nous comprenons dans ce quotidien, dans le rythme qui nous est imposé par le service. Nous le connaissons tous, puisque nous le vivons au même moment. Alors certes, nous sommes là chacun pour un événement qui nous est propre (prématurité, détresse à la naissance, malformation cardiaque, et d’autres encore), mais imaginons largement ce que l’autre traverse : nous nous comprenons et nous nous soutenons.
Etant ensemble dans cette même galère, il nous est plus facile de trouver les mots pour rassurer l’autre car ce sont ces mots que nous aurions nous-mêmes eu besoin d’entendre. Chacun a son moment de faiblesse à un moment donné, le plus souvent quand la date de sortie approche mais se fait encore tant désirer. Le moral oscille et nous joue des tours, et trouver du réconfort auprès de ces personnes est une vraie bouffée d’oxygène. Nous savons peut-être être plus attentifs à ces émotions car nous savons combien elles sont importantes.
Nous nous retrouvons dans cette enceinte protégée que nous voudrions pourtant tant fuir et ces échanges sont source de réconfort. Nous nous retrouvons ensemble pour partager un déjeuner sur le pouce dans la salle dédiée aux parents, nous parlons de tout et de rien, simplement pour se changer les idées. Et, bien entendu, nous partageons les progrès de nos nouveaux-nés. Ces derniers sont accueillis avec un réel engouement et surtout une vraie sincérité.
Nous toquons à la porte de la chambre voisine, simplement pour prendre des nouvelles. Nous partageons le bonheur de quelques grammes pris depuis la veille, une tétée réussie ou une nuit sans « bêtises ». Nous partageons bien sûr toutes ces déceptions, le poids qui flanche, les repas compliqués et les « bêtises » qui s’enchainent.
Nous employons le même vocabulaire, propre à ces lieux. Par exemple les « bêtises », joli petit mot qui décrit pourtant des événements bien plus graves : des soucis respiratoires (désaturation) ou encore cardiaques (bradycardie). Un joli mot pour dédramatiser, pour mieux accepter les difficultés.
Nous partageons aussi et surtout la même attente, le même objectif : celui de la sortie. Ce grand moment que nous attendons tous, cette liberté retrouvée, celle qui nous permettra de rentrer chez nous, notre enfant à nos côtés.
Nous partageons la joie des parents ayant quitté les lieux avant nous, nous partageons l’angoisse des nouveaux entrés. Ces émotions sont fortes et pourtant éphémères. Car tout aussi intenses qu’ont été nos échanges sur place, nous ne gardons aucun contact avec ces autres parents. Une fois la porte du service refermée, nous retrouvons nos vies et tournons bien vite la page de ces échanges passés.
Ces échanges m’ont pourtant marquée. Ils m’ont aidée à tenir et surtout à relativiser. Et souvent encore, je me demande comment chacune de ces familles a grandi et si tout va bien de leur côté…
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