Samedi. 15h. J’ai à mon actif 6 épisodes de Sex & the City, 2 siestes de 35 minutes, une excursion poubelles / boulangerie / boîte aux lettres (dans cet ordre), une manucure maison et 42 mots au compteur de ma page Word. 50 maintenant.
Le weekend dernier, c'était mon dernier weekend en tant que cadre et responsable adjointe de l’équipe projet de Telmar Peaktime. Après tout, pourquoi ne pas m’octroyer un break avant d’entrer officiellement, jeudi, dans la vie de chômeuse / freelance !
Et si à partir de jeudi tu tombais dans ces méandres de torpeur où ton cerveau aime à se perdre, sans ne jamais pouvoir sortir de la léthargie qui l’accompagne ? – Ne pas réfléchir, enchaîner les étapes.
Après moults sous-entendus depuis plusieurs mois, il est temps que je l’avoue haut, fort et clairement. 7 ans, 7 mois et 5 jours depuis ma dernière embauche, je quitte mon CDI et me lance dans la grande aventure : vivre de mon clavier qwerty autrement nommé Dame Pomme. C’est con, mon entourage commençait à peu près à comprendre ce que je faisais dans la vie.
C’est vrai que quand on me posait la question, la réponse prenait toujours des plombes : « Alors euh, en fait je suis chef de projet dans une boîte qui fait des logiciels pour placer des publicités à la télé, tu vois ? Je ne développe pas non, je coordonne les relations entre nos clients et les développeurs. En gros. Pour faire court ». Le genre de boulot dont ma conseillère d’orientation au lycée n’avait jamais entendu parler. Et par ailleurs, je pense que même mes clients aujourd’hui ne comprennent pas vraiment ce que je faisais de mes journées. J’aurais pu me contenter de « responsable projet » mais j’avais envie de démontrer que je me concentrais sur autre chose que des tableaux Excel.
Et là maintenant, il faudra dire quoi : Chômeuse ? Non parce que sérieusement tu vas vivre comment ? – Ne pas réfléchir, enchaîner les étapes.
Depuis plusieurs semaines, je m’entraîne à assumer mon nouveau statut en annonçant la nouvelle aux proches, en expliquant mon projet, répétant inlassablement la même histoire en bredouillant de moins en moins, et en ne baissant plus les yeux QUE quand j’entends des compliments. Petit à petit, j’avance donc sur le chemin de la confiance en moi, dernier obstacle majeur, élémentaire et terriblement déformant car il a cette capacité à rendre le vide dans lequel je me lance beaucoup plus profond qu’il ne l’est réellement.
Tout ça parce qu’un jour, ta grand-mère a dit que ce que tu écrivais c'était bien, tu crois vraiment que t’as les épaules ? – Ne pas réfléchir, enchaîner les étapes.
Ainsi c’est officiel. Et je dois commencer à faire attention à ce que j’écris car je balance les adresses de mes blogs et autre à la terre entière. Mes soon to be ex-collègues et ex-clients sont en mesure de venir cliquer ici ou là sur des posts toujours assumés, mais peut-être, parfois, en décalage avec l’image que je pouvais renvoyer dans un cadre plus professionnel. Jeudi soir dernier, j’ai envoyé en France, aux États-Unis, en Angleterre, en Pologne, en Belgique, en Norvège, au Danemark, aux Pays-Bas, les emails annonçant l’inévitable : C’était bien c’était chouette, mais c’est terminé. Certaines réponses sont purement polies (OK, merci, bisous. – en gros), d’autres plus personnelles ou curieuses de la suite.
On me parle ainsi parfois de mon professionnalisme et de mon sourire. Ça me va bien. Vous me direz, on ne va pas non plus me bâcher d’un coup d’incompétence et de sale tronche alors que j’en suis à faire ma dernière révérence. Quoi qu’il en soit, professionnalisme et sourire sont deux caractéristiques que je veux bien assumer.
Mouais, ça va vraiment suffire ça tu crois ? – Ne pas réfléchir, enchaîner les étapes.
Ce jeudi 1er octobre 2015, premier jour du reste de ma vie, je suis officiellement journaliste en construction et auteure en devenir. J’ai la flippe dans le bas du ventre, les larmes aux yeux et la voix qui tremble, mais bordel j’ai rarement été aussi fière de moi et aussi droite sur mes talons de 12.
Il n’est de toute façon plus question de réfléchir, mais bien, ici, là, maintenant, d’enchaîner les étapes. Alors ce n’est pas tout ça mais je dois vous laisser, j’ai des idées à trouver, des axes à développer et des synopsis à travailler pour envoyer des emails et relancer ensuite par téléphone, me construire mon réseau et, tout simplement, aligner les mots.
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