Culture

Argent : pourquoi 7 Français sur 10 n'ont pas un rapport serein avec l'argent

31 octobre 2025 - 15 : 31

par Clémence À l’occasion de la journée mondiale de l’épargne, un sondage révèle que 72 % des Français n’ont pas un rapport serein à l’argent. Entre prudence excessive, anxiété financière et héritage parental, les résultats dressent le portrait d’une société encore complexée par l’argent.

L’argent, sujet tabou par excellence, continue de diviser et d’inquiéter. Alors que la journée mondiale de l’épargne met chaque année en lumière nos comportements financiers, un sondage mené par l’institut Flashs pour Ymanci révèle à quel point la question de l’argent reste source de tension pour la majorité des Français.

Unsplash - Christian Dubovan

Selon cette étude publiée le vendredi 31 octobre 2025, 72 % des titulaires d’un compte bancaire déclarent ne pas avoir un rapport serein à l’argent. Parmi eux, la moitié se dit « trop prudente », un sur huit avoue ressentir une véritable anxiété financière, et seuls 28 % affirment vivre une relation apaisée avec leurs finances personnelles.

Ces chiffres mettent en évidence un malaise économique et émotionnel durable, lié autant aux contextes familiaux qu’aux pressions sociales et culturelles.

Une prudence qui vire parfois à l’angoisse

Le sondage met en lumière deux comportements dominants chez les Français : la prudence extrême et l’inquiétude permanente face à l’argent. Pour 50 % des répondants, gérer ses finances signifie avant tout se protéger du risque, quitte à se priver ou à renoncer à certains plaisirs. Cette prudence, souvent perçue comme une qualité, peut aussi révéler un manque de confiance dans le système économique ou une crainte de l’avenir.

Mais plus préoccupant encore, 13 % des Français reconnaissent souffrir d’une anxiété liée à l’argent, décrivant un rapport « oppressant » à leurs comptes, aux dépenses et aux imprévus. Ces personnes consultent fréquemment leurs relevés bancaires, redoutent les dépenses inattendues et vivent chaque achat comme une potentielle erreur.

Selon Ymanci, cette anxiété financière touche davantage les jeunes adultes, souvent précarisés par des loyers élevés, l’instabilité professionnelle et la peur du découvert. Chez les plus de 50 ans, en revanche, c’est une peur de perdre qui domine, héritée des crises économiques passées et de l’inflation récente.

L’argent, un héritage culturel et familial

L’un des enseignements les plus marquants de l’étude concerne l’impact du modèle parental sur la gestion financière. Plus de 67 % des Français reconnaissent que leurs habitudes en matière d’argent sont directement influencées par celles de leurs parents. Autrement dit, nos manières d’épargner, de dépenser ou d’investir ne seraient pas uniquement rationnelles, mais aussi profondément émotionnelles et éducatives.

Pour 59 % des sondés, cet héritage familial est jugé positif : ils estiment avoir appris la valeur de l’argent, le sens de l’économie et la rigueur budgétaire dès l’enfance. Mais 8 % des répondants voient dans cette transmission une influence négative, marquée par la peur du manque, la méfiance envers la richesse ou un rapport culpabilisant à la dépense.

En somme, les Français reproduisent souvent, consciemment ou non, les schémas qu’ils ont observés dans leur foyer :
– Les familles où l’argent était rare cultivent la prudence et la peur du risque.
– Celles où l’argent n’était pas discuté entretiennent un certain tabou financier.
– Et celles où la réussite matérielle était valorisée encouragent aujourd’hui un rapport plus décomplexé à la richesse.

Le poids du silence autour de l’argent

L’argent reste en France un sujet délicat, souvent entouré de pudeur. Parler de ses revenus, de ses dettes ou de ses investissements demeure tabou, y compris entre amis proches ou au sein du couple. Cette culture du silence entretient une méconnaissance des mécanismes financiers et alimente les angoisses.

D’après Ymanci, près d’un Français sur deux avoue ne jamais discuter d’argent avec ses proches, même lorsqu’il traverse une période difficile. Cette absence de dialogue favorise la solitude face aux décisions financières et empêche souvent d’apprendre à mieux gérer son budget.

Les experts de l’épargne soulignent d’ailleurs que les pays où l’argent est un sujet assumé et enseigné dès l’école, comme les États-Unis ou les pays nordiques, comptent bien moins de citoyens anxieux face à leurs finances.

Des inégalités persistantes entre hommes et femmes

Le sondage s’est également intéressé aux différences de rapport à l’argent selon le genre, et les résultats révèlent encore des écarts significatifs.

Enfance, éducation, représentations : 17 % des personnes interrogées déclarent qu’enfant, ils pensaient que l’argent était une affaire d’hommes. Ce chiffre, bien que minoritaire, reste révélateur d’un héritage culturel encore ancré.

En revanche, une évolution nette est observée chez les femmes : 68 % d’entre elles affirment avoir été encouragées à devenir financièrement indépendantes. Une génération de mères plus attentives à l’autonomie économique de leurs filles semble avoir modifié les codes, contribuant à une prise de conscience collective.

Mais malgré cette progression, les inégalités économiques persistent. Les femmes continuent d’être plus nombreuses à ressentir une anxiété financière, notamment à cause d’un écart salarial toujours existant, d’une préoccupation plus forte pour la stabilité du foyer et d’une sous-représentation dans les investissements à risque.

Une éducation financière encore insuffisante

Si les Français sont prudents, c’est aussi parce qu’ils se sentent mal informés. L’étude montre que beaucoup manquent de repères concrets pour gérer leur argent efficacement.

Près de 60 % des sondés déclarent ne pas savoir comment évaluer correctement un taux d’intérêt ou choisir un produit d’épargne adapté. Et 40 % reconnaissent ne pas comprendre précisément le fonctionnement de leur crédit immobilier ou de leur assurance vie.

Pour les économistes, cette carence d’éducation financière explique une bonne partie du stress observé : « Ne pas maîtriser les bases de l’économie domestique génère de l’incertitude, et donc de l’anxiété », souligne un spécialiste cité par Ymanci.

Certains pays européens ont d’ailleurs introduit des cours d’éducation budgétaire dès le collège, avec des résultats encourageants sur la confiance des jeunes adultes face à leurs finances.

La prudence française : une valeur refuge ou un frein ?

Traditionnellement, la prudence est considérée en France comme une vertu économique. On épargne par précaution, on évite les dettes, on investit peu. Mais ce réflexe, s’il protège, peut aussi limiter les opportunités financières et entretenir la peur du risque.

Les experts financiers parlent d’une culture de la sécurité héritée d’un passé marqué par les crises et l’instabilité économique. Pourtant, cette prudence excessive se traduit souvent par une faible rentabilité de l’épargne, notamment lorsque les Français laissent dormir leurs économies sur des comptes courants non rémunérés.

Selon Ymanci, près de 45 % des Français reconnaissent ne pas savoir comment faire fructifier leur argent autrement que par l’épargne bancaire classique. Ce manque de diversification freine leur capacité à anticiper les imprévus ou à préparer leur retraite.

Le contexte économique accentue la méfiance

Il faut dire que le contexte actuel n’aide pas à apaiser les esprits. Entre inflation, hausse des taux d’intérêt, et incertitudes politiques, les Français ont du mal à se projeter sereinement dans l’avenir.

Ces dernières années, la flambée des prix de l’énergie, des loyers et des produits alimentaires a pesé sur le pouvoir d’achat. Pour beaucoup, l’épargne sert désormais à compenser les fins de mois, plutôt qu’à préparer des projets à long terme.

Ce climat économique contribue à entretenir une relation émotionnelle à l’argent, faite d’inquiétude, de vigilance et parfois de fatalisme.

Vers une génération plus décomplexée ?

Malgré ces constats, une évolution positive se dessine. Chez les moins de 35 ans, le rapport à l’argent semble moins tabou et plus réfléchi.

Les jeunes adultes n’hésitent plus à parler finances entre amis, à se renseigner sur les placements, ou à utiliser des applications de gestion budgétaire. Beaucoup perçoivent l’argent comme un outil de liberté plutôt qu’un sujet de honte ou de peur.

Les plateformes de vulgarisation financière, les influenceurs spécialisés en économie et les médias sociaux contribuent à démocratiser les notions de budget et d’investissement, ouvrant la voie à une génération plus informée, plus agile et peut-être plus sereine.

En résumé

Le sondage Flashs pour Ymanci met en évidence une réalité frappante : 72 % des Français ne se sentent pas à l’aise avec l’argent. Entre prudence extrême (50 %) et anxiété financière (13 %), l’argent reste un sujet sensible, chargé d’émotions, de peurs et d’héritages familiaux.

Les causes sont multiples : éducation financière insuffisante, influence parentale, inégalités de genre, et contexte économique incertain. Pourtant, les signes d’évolution sont bien là : les nouvelles générations se montrent plus ouvertes, plus curieuses et plus désireuses de comprendre les mécanismes financiers.

Si l’argent reste pour beaucoup un sujet d’inquiétude, il devient aussi un levier d’autonomie et de liberté pour ceux qui apprennent à le maîtriser. Et c’est peut-être là le véritable enseignement de cette étude : la sérénité financière n’est pas une question de richesse, mais de connaissance et de confiance.

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Clémence

Je fais partie de la rédac' SBG, et j'aime écrire, sortir, m'amuser, manger (très important, ça aussi !) et partager. Je vous propose donc régulièrement de découvrir mes derniers coups de <3.