Beauté

Des chercheurs écossais ont réussi à créer du paracétamol à partir de déchets plastiques

23 juin 2025 - 19 : 46
par Clémence Des chercheurs d’Édimbourg ont mis au point un procédé inédit qui transforme les débris de bouteilles PET en paracétamol grâce à une bactérie E. coli génétiquement modifiée, ouvrant la voie à un recyclage circulaire et écologique du plastique.

Un médicament devenu symbole d’une économie plus verte

Des équipes de l’université d’Édimbourg viennent de publier dans Nature Chemistry une étude révolutionnaire. Elles démontrent qu’il est possible de transformer des déchets plastiques PET en paracétamol, le médicament anti-douleur et antipyrétique le plus consommé au monde. Cette prouesse combine une réaction chimique initiale et une biotransformation assurée par une souche de Escherichia coli génétiquement modifiée, créant ainsi un procédé hybride alliant chimie verte et biotechnologie.

De la bouteille PET… au paracétamol : un pas de géant vers le recyclage circulaire

Pourquoi cette innovation est cruciale

Jusqu’à présent, le paracétamol était produit principalement à partir de dérivés pétrochimiques, par des sous-traitants souvent basés en Asie, dans des process peu coûteux mais fortement émetteurs de CO₂. À l’inverse, le nouvel itinéraire d’Édimbourg valorise un déchet majeur de notre société de consommation : la bouteille en PET. En donnant une seconde vie au plastique, ce projet ouvre la voie à une économie circulaire où chaque matériau trouve un débouché de haute valeur ajoutée, réduisant la dépendance aux énergies fossiles et la pollution plastique.

Comment fonctionne le processus de biotransformation chimio-biologique

Extraction des monomères : la première étape consiste à dépolymériser le PET par hydrolyse chimique, libérant l’acide téréphtalique et l’éthylène glycol, deux monomères utilisables comme matières premières. Cette opération, contrôlée à haute température en bioréacteur, retire les chaînes longues du plastique pour en obtenir des molécules de base.

Synthèse de l’acide PABA : ces monomères deviennent le substrat d’une réaction chimique secondaire, produisant de l’acide p-aminobenzoïque (PABA), un précurseur clé du paracétamol. C’est là qu’intervient la chimie fine, adaptée pour fonctionner sans solvants toxiques et limiter les déchets secondaires.

Fermentation bactérienne : une souche d’E. coli, conçue par génie génétique, est capable d’absorber le PABA et de le convertir en paracétamol. En introduisant des gènes spécifiques codant pour les enzymes d’acétylation, les chercheurs ont transformé cette bactérie en véritable usine vivante. Les cultures se développent en quelques heures, produisant des cristaux de paracétamol qui sont ensuite purifiés par filtration et cristallisation.

Les atouts et les défis de ce recyclage pharmaceutique

Une empreinte carbone réduite

À terme, substituer la filière pétrochimique par des déchets plastiques PET pourrait diminuer drastiquement les émissions de CO₂ liées à la production de médicaments. Ce procédé permettrait aussi de détourner des millions de bouteilles de la pollution marine et terrestre.

Un approvisionnement localisé

En implantant des bioraffineries près des centres de tri ou des usines de recyclage, les collectivités pourraient fluidifier la logistique, réduire les coûts de transport et créer de l’emploi local dans la collecte et le prétraitement des plastiques.

Optimisation nécessaire

Les rendements actuels de PABA restent faibles, et la montée en échelle industrielle pose des défis techniques : conception de bioréacteurs, maîtrise des conditions de culture, récupération des solvants. Il faudra augmenter la productivité des souches bactériennes et fluidifier le processus pour atteindre les volumes requis par l’industrie pharmaceutique.

Le scepticisme des ONG et la réalité du terrain

Plusieurs voix, notamment l’ONG Beyond Plastic, rappellent que de nombreuses « bactéries mangeuses de plastique » n’ont jamais dépassé le stade expérimental. Melissa Valliant souligne la difficulté de transformer ces démonstrations de faisabilité en solutions opérationnelles. Pour rassurer environnementalistes et investisseurs, les chercheurs doivent démontrer la durabilité et la rentabilité de leur procédé, incluant un bilan carbone complet et des études de risque sanitaire.

Des perspectives de développement et d’innovation

Programmes pilotes

L’équipe d’Édimbourg prévoit de lancer un site pilote capable de traiter plusieurs tonnes de PET par semaine. En partenariat avec des collectivités et des entreprises pharmaceutiques, ils espèrent valider les aspects réglementaires et économiques d’ici deux ans.

Collaboration industrielle

AstraZeneca, cofinançant la recherche, envisage d’intégrer cette technologie à sa chaîne de production, explorant la co-localisation des usines pharmaceutiques et des centres de recyclage. D’autres laboratoires européens comme ceux de l’Université de Valence s’intéressent également à l’édition génétique des bactéries pour améliorer la conversion et élargir le spectre de molécules produites.

Formation et recherche

Une école d’été à Édimbourg réunira chimistes, microbiologistes et ingénieurs pour former la relève. L’objectif est de créer une communauté pluridisciplinaire maîtrisant à la fois chimie verte et biotechnologie, prête à relever les défis du recyclage circulaire.

Vers une nouvelle ère pharmaceutique et environnementale

Cette percée d’Édimbourg marque un tournant : le plastique n’est plus seulement un déchet à gérer, mais une ressource pour la production de molécules à haute valeur ajoutée. Si les défis industriels restent nombreux, le concept d’une économie circulaire reliant déchets plastiques et médicaments se profile comme une réponse innovante aux crises du climat et de la surproduction. À l’heure où la pollution plastique menace les océans et où la dépendance pétrochimique pèse sur l’environnement, ce processus chimio-biologique offre une lueur d’espoir : celle d’un futur où chaque bouteille jetée pourrait soigner, plutôt que polluer.

Découvrez maintenant C'est prouvé : plus on passe du temps en pleine nature et moins on consomme de médicaments ! et pourquoi se promener chaque jour en pleine nature rend beaucoup plus heureux (et c'est prouvé !).

Lire aussi : Pourquoi les médecins écossais prescrivent des promenades dans la nature à leurs patients, et pourquoi vous devriez faire pareil

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Clémence
Je fais partie de la rédac' SBG, et j'aime écrire, sortir, m'amuser, manger (très important, ça aussi !) et partager. Je vous propose donc régulièrement de découvrir mes derniers coups de <3.