En février dernier, comme beaucoup d'entre nous mesdames, j'étais allée voir Cinquante nuances de Grey au cinéma. J'étais ressortie de la salle franchement mitigée. Il faut dire que j'avais lu les livres et que ça ne m'a pas aidée à être pleinement satisfaite de l'adaptation.
Mais ! Je suis le genre de nanas à persévérer. Alors vous pensez bien que lorsque j'ai appris qu’E.L. James avait sorti un nouveau volet de la saga mondialement connue, je n'ai pas pu m'empêcher de l'acheter ! J'avais évidemment entendu dire que le tome 4 de Cinquante nuances était en chantier. D'ailleurs, on avait eu un bel avant-goût à la fin du tome 3, avec un épilogue de la rencontre entre nos deux protagonistes vue par Christian. Cela m'avait semblé de bon augure et m'avait donné envie de le shopper dès sa sortie.
Le contexte
C'est donc par les yeux de notre ténébreux homme d'affaires presque trentenaire que nous revivons le premier tome de la saga. Pour celles qui auraient loupé le train en marche, il s'agit d'une romance entre une jeune étudiante en lettres, Mademoiselle Anastasia Steel, et son amant aux goûts très particuliers (comme il se plaît à le répéter), Monsieur Christian Grey. Christian est en effet un adepte du BDSM (Bondage, Discipline, Domination, Soumission, Sado-Masochisme). Beaucoup de choses à digérer pour une demoiselle qui n'a jamais eu de relations sexuelles. Le livre (tome 1 et 4 du coup) tourne autour de leur rencontre, de leur apprivoisement mutuel et de l'initiation d'Anastasia au monde du mystérieux Christian.
Mon avis
Maintenant que j'y pense, je crois que j'aurais pu écrire une trilogie moi aussi ! Suite à ma lecture des trois premiers livres, j'en étais à quelque chose comme Cinquante nuance d'excitation. J'avais adoré. Je les avais dévorés en quelques jours sans aucun souci. Ces bouquins ont reçu pas mal de critiques négatives, mais honnêtement, bien que je sois assez difficile en matière de lecture, j'avais accroché très vite avec l'histoire et le style de l'auteur. Ensuite, je suis passée par Cinquante nuances de désillusion au travers de l'article que je vous avais rédigé au sujet du film (par ici). Et en lisant Grey, je me suis retrouvée face à Cinquante nuances de platitude...
Je pensais que ça ne me dérangerait pas tant que ça de relire la même histoire vue par quelqu'un d'autre. Et puis en fait si ! Je vous avoue que c'est franchement barbant (pour rester polie). D'autant que le monsieur n'arrête pas de se répéter ! La première fois qu'ils s'embrassent dans l'ascenseur, sur deux pages, vous avez le droit trois fois à "Mais pourquoi elle me fait cet effet-là ?". Tu sais bichon, très franchement, au bout d'un moment, on commence à piger qu'elle te fait de l'effet. Par la suite, c'est au tour de "dis oui", "sois à moi", "accepte ma proposition" et autres phrases fleuries du genre "je te baiserais bien là tout de suite" à tel endroit ou à tel autre (mais ça, on a l'habitude, c'est Christian).
L'auteure nous entraîne grosso-merdo dans 500 pages (le livre en compte 556) de déjà vu, à peine pimentées par les pensées d'un Christian qui tourne en rond et nous sert la même rengaine pendant tout le bouquin : "elle va s'y faire, montre-lui, quand elle aura vu qui tu es elle se tirera, ça peut le faire si tu y vas doucement, fais-moi confiance, il faut qu'on soit honnêtes sinon ça ne fonctionnera pas" (je résume mais en gros c'est ça).
Les rares scènes où il est seul et où on pourrait en apprendre davantage sur lui sont sans intérêt et se résument à Christian qui court, Christian qui boxe, Christian qui mange, Christian qui bosse ou Christian qui dort. Franchement, me voilà fascinée. Il y a bien quelques moments de flashback pendant des rêves où on en voit un peu plus sur son enfance (sommaire et répétitif), sur sa relation avec Elena (encore plus sommaire) et sur Leila (carrément expéditif), mais cela reste tellement survolé que cela en devient anecdotique.
J'attendais aussi beaucoup de la séance finale avec la ceinture, qu'il nous explique pourquoi il aime faire mal (même si on peut facilement l'imaginer), qu'on en sache plus sur ce que ça lui fait de battre Anastasia, mais non ! Néant !
Le seul moment qui aurait encore pu sauver la mise étaient l'entretien avec Flynn après le départ d'Ana, à la fin du livre. J'étais curieuse de savoir ce qu'ils avaient pu se dire, mais malheureusement, cela se passe de manière tout aussi rapide et insipide que le reste.
De même, le cheminement intellectuel de Grey, par rapport à sa rupture et relation avec Ana n'est pas assez poussée, et reste sans profondeur. On s'attend à lire tout ce qu'il pense avant qu'il le fasse. D'un homme mystérieux et torturé qui attisait ma curiosité, E.L. James en a fait un personnage fade, prévisible, qu'elle n'aura pas du tout su exploiter.
C'était pourtant un roman prometteur, où l'auteure aurait pu nous attirer dans un esprit profondément tourmenté par son passé. Là où elle avait parfaitement su rendre ce côté inaccessible et complexe de Grey dans ses trois premiers livres, on ne fait que toucher du doigt la nature profonde de Christian, et je pense qu'on ne l'atteindra sans doute jamais.
Il aurait été plus intéressant de nous proposer un livre sur l'époque où il était le soumis d'Elena. Cela nous aurait permis de davantage comprendre le personnage qu'il est devenu, et de le voir dans un autre rapport de force. Je ne peux m'empêcher de penser que le Christian soumis aurait carrément mieux donné le change que le mollasson de ce nouveau volet !
Pour finir, je n'ai pas ressenti grand-chose en lisant ce livre. On s'attend à un minimum d'adrénaline quand on lit un roman érotique. Là j'avoue que de ce côté, le déjà vu gâchait l'excitation du moment. De même, j'ai plusieurs fois versé ma larme dans les trois tomes précédents. Ici, très honnêtement, côté émotion : calme plat.
Me voilà bien déçue !
Ce qui nous donne Cinquante nuances de platitude...
Et vous ? Avez-vous lu la trilogie ? Le quatrième tome vous fait-il envie ?