Juillet, Balzac, la chute. Ce fut long, ce fut lourd, le contraste avec juin et la facilité que j’ai pu avoir alors pour dévorer Duras est impressionnant. Du coup, j’ai failli à mon pari, à mon challenge, et c’est le 2 août que j’ai achevé le livre avec quelques petites heures de retard sur le mois de juillet.
Reprenons.
Balzac, la Comédie humaine, c’est une œuvre de plus de 90 ouvrages, tous écrits par Balzac et retraçant le périple de personnages plus ou moins récurrents au sein de la société de l’époque. C’est une saga écrite entre 1829 et 1850 où chaque roman est indépendant. On y dépeint la vie parisienne d’alors mais aussi les campagnes pour certains romans, la vie militaire, politique…
Le Père Goriot décrit l’histoire d’Eugène de Rastignac (ce jeune homme), Vautrin (cette énigme), le Père Goriot (ce père de deux filles), tous trois pensionnaires de Madame Vauquer, rue Sainte Geneviève à Paris. Il est aussi question des filles du père, celles qui donnent au titre du livre son sens : Delphine et Anastasie.
Le Père Goriot est une histoire d’amour (l’amour d’un père, l’amour des jeunes gens, l’amour déçu, l’amour victorieux peut-être), d’argent (son manque), de pouvoirs qui nous plongent dans le quotidien d’une époque entre petits trafics, pauvres et bourgeois, et roublardise.
Les premiers mots : Madame Vauquer, née de Conflans, est une vieille femme […]
Les derniers : […] Rastignac alla dîner chez Madame de Nucingen.
L’écriture est précise. La description des personnages très fine, et c’est sans grande surprise que j’ai découvert par ailleurs les dessous d’une œuvre : Balzac un acharné de travail enchaînant les journées de plus de 20 heures était aussi dans une constante contemplation et analyse de son époque. Son œuvre est un classique au sens pur du terme : un héritage précieux, témoignage vif et précis auquel s’entremêlent les rebondissements et le romanesque nécessaires pour construire une histoire.
Vu d’ici, pas grand-chose à redire. Et de fait, je pense sincèrement que dans d’autres circonstances, à une autre époque, ça aurait vraiment pu le faire entre Balzac et moi. Mais l’étincelle ne se décide pas. Cher Honoré : ce n’est pas toi, c’est moi…
Moi qui ne supporte pas qu’on m’explique ce que je dois penser d’un roman et mon édition annotée, introduite, commentée au-delà du nécessaire, mais l’impossibilité de se passer du nécessaire cependant, ton français et le mien ayant près de 200 ans d’écart.
Moi, #KOLaLisette depuis plusieurs semaines maintenant sûrement un peu à côté de mes chaussures.
Moi qui décroche quand il faut 3 phrases pour exprimer une même idée dans toutes ses subtilités, et il te faut parfois 3 pages.
Il paraît, quand on lit Balzac, que si l’ennui pointe il ne faut pas hésiter à lâcher le livre pour en choisir un autre. Ils ne manquent pas. J’ai tenu bon. Et je suis contente d’être allée au bout d’une histoire qui a mis près de 200 pages à me laisser entrevoir où elle allait aller. 200 pages, c’est long. Mais le dernier tiers du livre m’a laissé une emprunte que je suis contente de garder. Un des ces auteurs qui malheureusement me rabaisse de sa hauteur, mais dont on se sent plus grande après l’avoir lu.
Morceaux choisis :
- Page 57 :
« Eugène de Rastignac, ainsi se nommait-il, était un de ces jeunes gens façonnés au travail par le malheur, qui comprennent dès le plus jeune âge les espérances que leurs parents placent en eux, et qui se préparent une belle destinée en calculant déjà la portée de leurs études, et les adaptant par avance aux mouvements futurs de la société, pour être les premiers à la pressurer. Sans ses observations curieuses et l’adresse avec laquelle il sut se produire dans les salons de Paris, ce récit n’eût pas été coloré des tons vrais qu’il devra sans doute à son esprit sagace et à son désire de pénétrer les mystères d’une situation épouvantable aussi soigneusement cachée par ceux qui l’avait créé que par celui qui la subissait.
- Page 61 :
« Mais Paris est un véritable océan. Jetez-y la sonde, vous n’en connaitrez jamais la profondeur. Parcourez-le, décrivez-le ? quelque soin que vous mettiez à le parcourir, à le décrire ; quelque nombreux et intéressés que soient les explorateurs de cette mer, il s’y rencontrera toujours un lieu vierge, un antre inconnu, des fleurs, des perles, des monstres, quelque chose d’inouï, oublié par des plongeurs littéraires. La Maison Vauquer est une de ces monstruosités curieuses. »
- Page 252 :
« - Voilà mamman Vauquerre belle comme un astrrre, ficelée comme une carotte. N’étouffons-nous pas un petit brin ? lui dit-il en mettant sa main sur le haut du busc ; les avant-cœurs sont bien pressés maman. Si nous pleurons, il y aura explosion ; mais je ramasserai les débris avec un soin d’antiquaire.
- Il connaît le langage de la galanterie française, celui-là ! dit la veuve en se penchant à l’oreille de madame Couture »
- Page 299 :
« - Oui si je suis dans une abîme, il y a peut-être de votre faute, dit Delphine. Nous avons si peu de raison quand nous nous marions ! Connaissons-nous le monde, les affaires, les hommes, les mœurs ? Les pères devraient penser pour nous. Cher père je ne vous reproche rien, pardonnez-moi ce mot. En ceci la faute est toute à moi. Non, ne pleurez point, papa, dit-elle en baisant le front de son père. »