Et là, tu as envie de répondre "cool on est contents pour toi" et moi je te rétorquerais "ouais et ça nous fait un sentiment positif en commun". Trêve de plaisanterie.
Parfois, j'aimerais me rassurer et m'imaginer que je ne suis pas la seule à avoir vu sa relation père-fille changer à l'adolescence. Du statut privilégié de la "petite fille chérie" me voilà devenue celle "avec qui c'est presque froid et surtout tendu". Le milieu psychologique explique d'ailleurs assez bien le phénomène. La transformation du corps d'enfant à celui d'une presque femme jouerait un rôle considérable dans ce "détachement" paternel. Les pères évitent de câliner leur progéniture, certainement trop gênés de devoir frôler des formes féminines. En même temps, comment leur en vouloir ? Lu comme cela, on irait presque croire qu'il pourrait s'agir d'un acte incestueux. Mais bref...
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En partant de chamboulement hormonal, les relations avec mon père ont considérablement pris un tournant des plus bruts. Comment gérer le passage du "je joue au trampoline sur le bidou de mon papa" à "il m'évite, ne me regarde quasiment plus et en plus on ne communique pratiquement pas" ?
Eh bien assez mal... C'est de là que naissent beaucoup des troubles de dépendance affective chez la femme. Ce manque d'amour ressenti la plongera dans l'obsession de combler ce vide avec les hommes. Bonjour la catastrophe. Nous avons toutes connu des relations où nous avions inexplicablement besoin de l'autre, comme si notre oxygène dépendait de lui. Dès lors que le partenaire ne nous apportait pas ce que l'on souhaitait, c'était la catastrophe assurée, la crise de larmes (et de nerfs) : le mec prenait peur, il nous considérait en plus comme une folle de service et il nous quittait. Paf chagrin d'amour, paf les hommes sont des tous cons et paf la déprime, voire paf je couche avec n'importe qui pour tenter de me sentir aimée (bon moi je n'ai pas expérimenté le stade du je me tape le premier venu). Voyez le schéma, il paraît simpliste mais il est malheureusement commun et difficile à briser.
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Soucieuse, blessée et coincée dans l'incompréhension, c'est à se demander si chaque année ne creusait pas ces liens qui nous unissaient. J'ai tenté de comprendre mais j'étais trop jeune pour avoir le recul nécessaire. J'en ai conclu que mon père ne m'aimait pas plus que cela, qu'il n'était pas très gentil et que les garçons étaient vraiment une prise de tête (j'avais 14 ans et je me rendais déjà compte que les mecs étaient vraiment étranges ah ah).
Dix ans plus tard, une professionnelle me conseillait de crever l'abcès et d'écrire une lettre à mon père pour lui faire part de mon ressenti. Je me souviens très bien le stress créé cet instant-là.
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Est-elle complètement tarée ?! Est-elle est en train de me demander de poser sur le papier des mots que je suis incapable d'adresser à mon père ? Mais elle veut que je me coltine une honte internationale ou quoi ? Mon père va me prendre pour une cinglée ! Laisse tomber les idées à deux balles, cette femme veut ma mort mentale. Je vais lui balancer "coucou Papa, je ne comprends pas avant on était super proches et puis maintenant on est loin" ? YOUHOOOOOOOOU mais bien sûr JAMAIS DE LA VIE.
Avant, la peur et l'ego prenaient le pas sur mes réactions. Mais ça c'était avant... Avant que je ne devienne super mature, super responsable (super mytho surtout ah ah)... Non, avant que je ne commence un long travail axé développement personnel / bien-être et que je comprenne l'importance de dire les choses aux autres, surtout quand elles sont positives. Se délivrer soi c'est permettre aux autres de se sentir également mieux.
Cinq ans plus tard, je me surprends à vouloir coucher ces non-dits. Et c'est naturellement que j'ai pris mon stylo pour effectuer cet exercice. Ce fut non sans crainte que j'écrivis avec le coeur. Difficilement, entrecoupé de pleurs et avec des pauses, trente minutes plus tard je signais de mon prénom.
Trois jours plus tard, pour coïncider avec sa date d'anniversaire, c'était timbré et mis à la boîte.
Par cet acte, je ne cherche pas à redorer mon image ou à faire plaisir. Non. Mes motivations sont bienveillantes. Je me dis que je n'aimerais pas perdre les êtres qui me sont chers avec des non-dits.
Soulager son coeur, c'est soulager son âme. Faites le test et vous verrez.
PS : la lettre est censée arriver dans deux jours. Je crois que j'ai le trac.