Ils sont tous plus vieux que moi.
Par ailleurs, j'ai aussi un téléphone portable, a.k.a. un mobile. Et depuis quelques années, il est même... smart ! Le truc un peu ballot, c'est qu'on s'attache à ces bêtes-là.
Par exemple, ça occupe... et dans le grand n'importe quoi qu'ont été mes journées ces dernières semaines, j'ai tué ma batterie quotidiennement en regardant 10 à 100 fois par jour si j'avais :
- des emails
- des messages
- des appels en absence (des fois que ça aurait vibré quand je m'éloignais de lui, c'eut été dommage parce que c'était rare, mais, on ne sait jamais) (ou des fois que je n'aurais pas bien vu 3 minutes avant)
- la météo (oh, il pleut ! regard fenêtre : ah oui, il pleut !).
- des trucs à lire sur Facebook (pas trop)
- des trucs à lire sur Twitter (beaucoup trop)
- des nouvelles photos à voir sur Instagram (je me suis aussi inscrite sur Instagram pendant cette période, ça m'a bien occupée une demi-matinée je pense)
- des trucs à lire sur Hellocoton (histoire de continuer mon travail anthropologique sur la blogosphère – vaste sujet)
(on remarquera que j'ai subtilement mis un lien vers l'ensemble de ces petites pages en question pour t'inciter, toi, lecteur, à venir m'y suivre !)
Sauf qu’on s’attache tellement que parfois, j’ai du mal à comprendre certaines logiques. Par exemple, quand on est en réunion, que le téléphone d’un de mes collègues sonne (déjà allô, les vibreurs ça existe…) et que, au choix :
- Il (ça sera un homme) regarde qui l’appelle, répond d’un « j’peux pas te parler, j’suis en réunion, mais dis moi ». Ce genre de phrase, ça sert à quoi ? Montrer à quel point on est trop super occupé / important ? Ou est ce que ça se veut être une marque de politesse genre « je ne peux pas mais je fais l’effort de te répondre en t’expliquant que t’es re-lou au passage » ? Dans tous les cas, quand je suis la personne à qui on dit ça, je me dis que j’aurais préféré laisser un message à une boîte vocale plus disponible. Et quand je suis la personne qui est en réunion en face de ce genre de réaction, je me dis « comme tu sembles mesurer ton impolitesse vis-à-vis de moi qui étais en train de te parler, pourquoi dans ce cas-là est-ce que tu le fais quand même ? ».
- Il regarde qui l’appelle, doit juger que ça peut attendre (pfiou, sauvée), mais laisse sonner, ou, variante, met 10 secondes à décider si oui ou non il va répondre, le tout en laissant sonner. Parce que cette sonnerie d’iPhone que tout le monde a, elle fait du bien à tes oreilles ? Moi non. Sérieusement.
- Autre option, plus rare mais tout aussi incompréhensible : ne regarde même pas qui appelle et coupe. Mais dans ce cas-là, pourquoi rapporter son portable avec soit ?
Je me remémore alors ces réunions où l’on a en face de soit une succession de gens scotchés sur leur téléphone. Ils sont importants, ils ne peuvent quitter leurs emails plus de 10 minutes. Ou ils jouent à Candy Crush. Autre option.
La double tristesse dans cette histoire, c’est qu’en plus de l’irrespect général que je trouve à ces actes devenus si banals, on perd la créativité de l’ennui dans des réunions où nos cahiers sortaient recouverts de petits dessins… Les mêmes que ceux que l’on gribouillait sur le bloc-notes accolé au téléphone avec un fil, ce fameux fil qui nous empêchait de faire autre chose, ce fameux fil qui nous faisait ruser d’inventivité pour papoter à l’abri des oreilles curieuses.
Avant, c’était mieux. Je suis vieille.
C’est qu’évaluer l’ordre des priorités est devenu compliqué avec le téléphone intelligent. Le mien par exemple, est fin, rose, de taille convenable (grand mais pas trop). Il fait des photos dégueus (et donc Instagram, tu ne veux pas me suivre ?) et est construit en Chine par des enfants, mais on ne peut pas tout avoir. Des jolis téléphones roses comme ça, ça court pas les boulevards mon ami.
Un an et demi donc que je le trainais joyeusement dans mon sac. Jusqu’à ce jour fatidique où notre attachement nous a perdus. J’aurais envie de dire « lui surtout », mais en fait je n’en suis pas sûre.
Je rentrais avec des courses sur un bras, mon sac sur l'autre. Je trifouillais dans le second pour trouver mes clés en face de la porte, en bas de l'immeuble, qui pourtant ne demandait qu'un code. De l'autre main donc, je tentais de taper ce maudit code sur un digicode du genre capricieux. Arrivée au deuxième essai, le portable intelligent a vibré. La main qui cherchait les clés en anticipation de quand je serai enfin entrée dans mon immeuble a changé d'objectif, s'est calée sur le portable, l'a sorti, machinalement. « Oui, c'était un très bon week-end » disait le message. Face à l'urgence toute relative de cette nouvelle, j'ai voulu glisser à nouveau le portable dans le sac, j'ai cru y être, j'étais à côté, j'ai lâché cette précieuse petite chose rose fabriquée en Chine sans faire attention, elle est tombée au sol, j'ai dis "chhhhier" (comme ça), je l'ai ramassée et ai FINALEMENT réussi à débloquer cette p*tain de porte, monté les deux étages, posé les courses, contemplé les dégâts sur ledit téléphone (la veste, le sac, les chaussures et les écouteurs toujours en place). J'ai dis "chhhhier" (comme ça), parce que la vitre est explosée.
Moralité : j'en n'ai pas. Reste que quand je pars en réunion sur mes heures de travail, je laisse mon téléphone à mon bureau.
La politesse, bordel !