Dix ans de Paris 2024 racontés sans filtre
Lorsque Tony Estanguet décide de prendre la plume pour raconter son expérience à la tête des Jeux olympiques de Paris 2024, il ne cherche ni à enjoliver la réalité ni à dissimuler les coulisses d’un projet gigantesque.
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Dans son ouvrage Par amour du sport, publié le 13 novembre, le triple champion olympique dévoile des aspects rarement racontés : la dimension politique, institutionnelle et parfois émotionnelle d’une aventure titanesque.
Pendant dix ans, il a dû composer avec les attentes contradictoires des fédérations, des collectivités locales, des partenaires et des médias. Mais surtout, il a dû apprendre à évoluer dans l’ombre des chefs de l’État successifs.
Une gymnastique diplomatique intense qu’il détaille avec lucidité et franchise, révélant un monde où le moindre mot compte, où un geste peut avoir des répercussions inattendues, et où l’équilibre entre neutralité et stratégie est un exercice constant.
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Une décennie de dialogue compliqué avec trois présidents
L’un des passages les plus marquants du livre porte sur ses relations avec les trois présidents qu’il a croisés au fil du projet : Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron. Tous ont joué un rôle à un moment clé de l’aventure Paris 2024, mais tous ont aussi été source de tension, d’attente, d’exigence et parfois de confrontation.
Tony Estanguet confie n’avoir jamais voulu favoriser l’un ou l’autre. Une position qui lui a valu, selon ses mots, de se « friter avec tous ». Cette expression directe témoigne de la complexité d’un rôle qui dépasse largement la gestion sportive ou organisationnelle. Il s’agissait d’un véritable numéro d’équilibriste où la moindre maladresse pouvait alimenter des suspicions ou froisser un ego.
Il raconte : « Étant donné qu’ils ont tous un petit côté parano, je n’ai jamais pris position pour un politique plus que pour l’autre. À tour de rôle, je me suis frité avec tous. Et ça rassurait les autres. » Cette phrase, à elle seule, résume une part de son quotidien : avancer sur un projet national majeur tout en veillant à ne jamais s’aliéner un interlocuteur aussi puissant que déterminant.
Une diplomatie permanente
Dans le récit qu’il livre, Tony Estanguet insiste sur la dimension stratégique de ses échanges. Chaque déplacement, chaque inauguration, chaque prise de parole devait être calibrée. Il explique qu’il devait continuellement « faire attention à ce qu’il disait, à chaque geste », conscient que les présidents suivaient de près l’évolution du dossier.
À ce niveau, tout devient politique, même quand on ne se considère pas comme un homme politique. Et c’est précisément ce qui transparaît dans son témoignage : pour mener Paris 2024 à bien, il a dû faire de la politique sans en être réellement acteur, se glissant dans un rôle qui lui était indispensable mais étranger à sa formation sportive.
Il admet d’ailleurs : « J’ai fait de la politique au sens stratégique. » Cette phrase résume un apprentissage imposé par l’envergure du projet, où il fallait s’adapter à des interlocuteurs au style, aux priorités et aux tempéraments très différents.
Sarkozy, Hollande, Macron : trois styles, trois défis
Loin de se limiter aux confidences sur les tensions, Tony Estanguet raconte aussi ce que chacun des présidents lui a apporté. La nuance de son regard rend son témoignage encore plus riche, donnant un aperçu précieux de ce que représente réellement une collaboration avec des chefs d’État.
Sarkozy : l’énergie et le regard extérieur
De Nicolas Sarkozy, il retient avant tout la capacité à analyser un dossier rapidement. Un esprit vif, une vision extérieure souvent pertinente et une manière directe de poser les questions essentielles. Leur collaboration n’a pas été de tout repos, mais elle a été marquée par une véritable rencontre professionnelle, faite d’échanges francs et toniques.
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Hollande : la capacité d’absorption et la finesse analytique
Avec François Hollande, la dynamique était différente. Tony Estanguet se dit impressionné par sa capacité à « emmagasiner de l’information » et surtout à l’utiliser avec finesse. Une qualité qui l’a souvent aidé à mieux structurer ses dossiers et à anticiper les points sensibles. Un président calme, méthodique, parfois plus prévisible que ses homologues, mais redoutablement efficace dans les échanges.
Macron : la précision, la vitesse et la déstabilisation
Quant à Emmanuel Macron, Tony Estanguet décrit un président percutant, incisif, qui va droit au but. Ses questions arrivaient immédiatement sur les points fragiles, créant parfois une forme de déstabilisation. Mais il en garde un très bon souvenir, admirant ce ton direct et cette façon d’aborder les problématiques sans détour.
Il explique : « Macron, je l’ai trouvé hyper percutant, tout de suite il me posait des questions, et ça tombait directement sur ce sur quoi j’étais un peu fragile. »
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Derrière les tensions, un profond respect
Même s’il reconnaît avoir traversé des moments délicats, Tony Estanguet insiste sur une réalité : il a adoré travailler avec chacun d’eux. Les tête-à-tête, les discussions parfois houleuses, les ajustements constants ont participé à forger son expérience et à faire de Paris 2024 une réussite retentissante.
Il raconte avoir vécu des échanges intenses mais enrichissants. Tous les présidents l’ont impressionné à leur manière, tous ont apporté un éclairage particulier, une énergie spécifique ou une forme d’accompagnement décisive.
Son regard n’est jamais amer. Bien au contraire, il émane de ses propos une reconnaissance sincère, presque une admiration pour ces figures politiques qui, malgré leurs différences, ont contribué à la construction d’un projet collectif d’une ampleur inédite.
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Une aventure qui dépasse le sport
L’ensemble de son témoignage rappelle que Paris 2024 n’a jamais été un projet uniquement sportif. Il s’agissait d’un chantier politique, sociétal, diplomatique et institutionnel. Naviguer entre les attentes de l’État, les enjeux internationaux et les impératifs organisationnels nécessitait une intelligence émotionnelle rare et une capacité d’adaptation exceptionnelle.
En partageant ces coulisses, Tony Estanguet offre un éclairage inédit sur ce que signifie réellement porter un tel projet. Une décennie d’efforts, de discussions, de compromis et de décisions marquée par des rencontres intenses, parfois brusques, mais toujours constructives.
Et au-delà des tensions et des moments de friction, ce qu’il retient avant tout, c’est l’aventure humaine : exigeante, bouleversante parfois, mais profondément marquante.
Pour info, le livre Par amour du sport de Tony Estanguet est déjà disponible ici au prix de 10,90 €.
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