Un bras de fer médiatique prend une tournure inédite. Pour la première fois, Delphine Ernotte Cunci, présidente de France Télévisions, a accusé ouvertement CNews d’être « une chaîne d’extrême droite ».
Des propos forts, tenus dans une interview accordée au Monde et publiés ce jeudi, qui déclenchent une onde de choc dans le paysage audiovisuel français.
Une prise de parole sans précédent
Depuis plusieurs années, le groupe public s’efforce de garder une position de retenue dans la guerre médiatique opposant les chaînes privées de l’empire Vincent Bolloré et l’audiovisuel public. Mais cette fois, la dirigeante de France Télévisions a décidé de hausser le ton. « Il faut admettre que CNews est un média d’opinion », explique-t-elle. En utilisant pour la première fois le terme de « chaîne d’extrême droite », elle franchit un seuil symbolique qui ne manquera pas de provoquer des réactions, tant politiques que médiatiques.
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Une audition houleuse devant l’Arcom
Cette déclaration intervient au lendemain d’une audition devant l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, où Delphine Ernotte était accompagnée de Sibyle Veil, présidente de Radio France. Les deux dirigeantes ont dû répondre à des questions concernant une affaire sensible : la diffusion par le magazine conservateur L’Incorrect d’une vidéo montrant Thomas Legrand et Patrick Cohen, deux journalistes du service public, en pleine discussion avec des cadres du Parti socialiste. Une séquence qui a provoqué des accusations de connivence politique, largement reprises par les médias liés à Vincent Bolloré.
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L’offensive contre Vincent Bolloré
Delphine Ernotte n’a pas mâché ses mots à l’égard du milliardaire propriétaire du groupe Vivendi. Selon elle, « la galaxie médiatique de Vincent Bolloré veut la peau de l’audiovisuel public, réclame sa privatisation et l’exprime avec violence ». Pour la patronne de France Télévisions, il ne s’agit plus seulement d’une rivalité médiatique, mais bien d’une offensive politique et idéologique contre l’existence même de l’audiovisuel public en France.
Un climat politique tendu
À un an et demi de l’élection présidentielle de 2027, ces tensions ne sont pas anodines. L’enjeu dépasse la simple concurrence entre chaînes : c’est une bataille sur l’indépendance de l’information et la place de l’audiovisuel public dans le débat démocratique. Delphine Ernotte alerte également sur un phénomène inquiétant : « Une partie du personnel politique prend pour argent comptant ce qui est affirmé, et repris sur les réseaux sociaux, sans vérifier ce qui s’est vraiment passé. C’est ce qu’on appelle la post-vérité. » En citant l’exemple des États-Unis sous Donald Trump, elle trace un parallèle qui souligne le danger d’une dérive médiatique où la rumeur et l’opinion supplantent les faits vérifiés.
La fin d’un projet de fusion dans le public
Autre révélation notable de son interview : Delphine Ernotte n’est plus favorable au projet de rapprochement des entités de l’audiovisuel public sous une holding commune, projet défendu par Rachida Dati avant son départ du ministère de la Culture. Une position qui confirme les fractures internes et la difficulté de trouver un modèle consensuel pour l’avenir du service public audiovisuel.
Une guerre médiatique appelée à s’intensifier
Avec cette déclaration choc, le conflit entre France Télévisions et les médias du groupe Bolloré prend une dimension nouvelle. En qualifiant CNews de « chaîne d’extrême droite », Delphine Ernotte officialise une ligne de fracture idéologique qui ne pourra que s’amplifier à l’approche des échéances électorales. Entre accusations de partialité, menaces de privatisation et attaques croisées, le paysage audiovisuel français se trouve plus que jamais polarisé. Une bataille qui, au-delà des médias, touche directement à la question de la démocratie et de l’information citoyenne.
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