Il y a des rôles qui vous traversent, et d’autres qui vous transforment. Pour Alpha, le nouveau film de Julia Ducournau attendu en salles le 20 août, Tahar Rahim a choisi la deuxième voie : celle de la métamorphose physique totale. Dans une interview récente, l’acteur de 44 ans raconte avoir perdu 22 kg pour incarner un junky crédible, après avoir déjà pris 15 kg de muscle sur un autre projet. Entre discipline, tunnel de préparation et douleurs (il parle de tendinites à répétition), le comédien assume cette méthode qu’il compare à celle des sportifs de haut niveau : on s’entraîne, on s’abîme parfois, mais on vise la véracité à l’écran.
Au-delà du geste technique, ce choix interroge : que gagne-t-on à pousser le corps si loin, et qu’y laisse-t-on ? Entre l’ambition artistique d’un acteur qui refuse de “fabriquer” un personnage et l’inquiétude de ses proches face aux variations de poids à répétition, le débat est ouvert — et il dépasse largement le cadre du cinéma.
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Ce qu’il raconte dans son interview
Le récit est clair : pour ce rôle, Tahar Rahim a d’abord maigri de 15 à 16 kg, puis a décidé d’aller plus loin pour atteindre –22 kg au total. La logique qui guide ce choix tient en une phrase : “Si je n’ai pas cette apparence, j’abîme le film de l’intérieur.” Son corps n’est pas un détail : c’est la porte d’entrée vers le personnage, “la maison” dans laquelle il s’installe pour raconter une histoire. Il y a là une conviction, presque un crédo : au cinéma, l’image donne la première impression. Si le corps ne raconte pas juste, tout sonne faux.
Ce réalisme a un coût. L’acteur évoque des tendinites, cette douleur sourde et obstinée qui rappelle que les tissus n’aiment pas les montagnes russes. Il dit aussi sa méthode : préparation physique, encadrement médical (cardiologue, nutritionniste-biologiste), abnégation et solitude (“Quand tu es acteur, tu es tout seul avec ton personnage”). Une solitude choisie, mais lourde.
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Pourquoi ces transformations frappent
Parce qu’elles se voient, d’abord. Et parce qu’elles engagent. Sur un visage familier — celui révélé par Un prophète, confirmé par Le Passé, Samba, Désigné coupable ou même une incursion américaine comme Madame Web —, les variations de poids fonctionnent comme un choc visuel. On reconnaît l’acteur, mais on découvre autre chose : une fragilité, une âpreté, une vitesse intérieure nouvelles. C’est précisément ce que recherche Rahim : déplacer notre regard, nous faire croire au personnage en un plan.
Ensuite, ces transformations bousculent parce qu’elles posent la question des limites. Jusqu’où un artiste peut-il pousser son corps pour la vérité d’un rôle ? Où s’arrête le dévouement et où commence la mise en danger ? C’est là que l’esthétique croise l’éthique — et que le public, forcément, s’inquiète.
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Les inquiétudes et l’encadrement médical
La première à lever un drapeau orange, c’est Julia Ducournau elle-même, qui dit avoir eu peur en voyant l’ampleur de la perte de poids. Tahar Rahim la rassure : suivi cardiaque, suivi nutritionnel, gestion “au cordeau”. Le message est clair : pas de bravade, mais un protocole. La réalité, pourtant, c’est que le corps encaisse : les tendinites ne sont pas un caprice, ce sont des micro-lésions qui disent la fatigue des tissus.
Du côté de l’intime, on pense forcément à Leïla Bekhti, sa compagne. On imagine l’ambivalence : la fierté de voir un artiste se dépasser — et l’anxiété de constater, de film en film, ces variations qui laissent des traces. Les familles d’acteurs connaissent bien ce temps suspendu des préparations extrêmes : on accompagne, on encourage, on surveille. Et on respire quand le tournage se termine, en espérant un retour à l’équilibre.
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Ce que ça dit du métier d’acteur aujourd’hui
Le cinéma aime les histoires vraies — ou qui en ont l’air. Depuis dix ans, on voit se multiplier les rôles physiques : corps taillés, corps fondus, voix cassées, apprentissages intensifs (langues, instruments, métiers). La performance s’évalue aussi à l’aune du corps. Chez Rahim, le message est cohérent : le corps est un outil, un instrument de jeu, presque une matière première.
Reste la nuance : la vérité du jeu n’est pas uniquement dans la balance. Elle tient au regard, au rythme, au silence, à une main qui tremble ou à un souffle qui accroche. Le meilleur équilibre, sans doute, se trouve là : assez de transformation pour que l’illusion prenne, assez de prudence pour que l’art ne casse pas l’artiste.
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Les rôles qui ont façonné sa métamorphose
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Un prophète : la révélation, l’intensité brute et l’ascension d’un acteur qui imprime l’écran.
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Désigné coupable : la radicalité d’un corps amaigri, une humanité à nu, la reconnaissance critique.
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Alpha : la recherche d’un réalisme sans filtre, avec une perte de 22 kg qui sert le personnage autant qu’elle questionne la limite.
Les questions que cette démarche pose
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Santé : combien de temps faut-il pour revenir à un poids d’équilibre sans abîmer les tendons, le métabolisme, le sommeil ?
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Responsabilité : quel est le rôle de la production et de la réalisation pour poser des garde-fous clairs ?
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Transmission : quel exemple donne-t-on aux jeunes comédiens qui rêvent de “tout donner” dès le premier rôle ?
Ces questions ne visent pas à brider l’élan des artistes, mais à cadrer une exigence qui, mal gérée, peut devenir destructive.
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Un choix artistique qui reste inspirant
Ce qui frappe, malgré les réserves légitimes, c’est la constance de Tahar Rahim. Rôle après rôle, il cherche : une manière neuve d’habiter un personnage, un geste qui le sépare de la redite. Qu’on adhère ou pas à la méthode, l’engagement force le respect. Et il donne envie de voir Alpha avec ce regard-là : celui d’un acteur qui tente, qui risque, qui assume. On ne demande pas au cinéma d’être un sanctuaire confortable ; on lui demande d’éprouver quelque chose. De ce point de vue, la démarche dit déjà beaucoup.
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En bref
Tahar Rahim a fondu de 22 kg pour Alpha et assume une approche athlétique de son métier, avec préparation et suivi médical à la clé. Il reconnaît des tendinites, signe que le corps paye une partie de la note. Julia Ducournau s’est dite inquiète, preuve que l’entourage veille et pose des limites. Entre vérisme assumé et lignes rouges à ne pas franchir, le comédien rouvre un débat ancien : jusqu’où aller pour créer un personnage vrai sans se perdre en route ? La réponse se jouera à l’écran — et dans la capacité, après coup, à retrouver l’axe : du jeu, du plaisir, et un corps qui reste l’allié de l’artiste, pas son adversaire.
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