Une relation politique en pleine mutation
Depuis plusieurs années, Jordan Bardella est vu comme le dauphin désigné de Marine Le Pen. Propulsé à la tête du Rassemblement national, le jeune politicien de 29 ans a su imposer son style, sa stratégie médiatique et son aisance auprès des électeurs. En retour, Marine Le Pen lui a offert sa confiance, son soutien… et son nom. Mais à mesure que l’élection présidentielle de 2027 approche et que l’inéligibilité de Marine Le Pen devient une possibilité réelle, l’équilibre entre les deux figures du RN semble de plus en plus précaire.
Le 29 mai 2025, une phrase prononcée par Marine Le Pen depuis Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, a mis le feu aux poudres : "Je ne suis pas sûre qu’il connaisse très bien les problématiques de l’archipel." Une remarque cinglante, qui a immédiatement provoqué une onde de choc dans le paysage politique et révélé une tension jusque-là contenue entre la fondatrice du RN et son héritier.
Bardella, visé mais imperturbable
Interrogé dans la foulée par BFM TV, Jordan Bardella n’a pas laissé passer la remarque de son ancienne mentor. Sans hausser le ton, ni entrer dans une querelle frontale, il a choisi de répondre avec tact, mais non sans fermeté. "Je ne rentrerai pas dans le concours de la petite phrase qui consiste à commenter, sur-commenter, sur-interpréter ce qui est dit de part et d'autre", a-t-il déclaré avec calme. Une manière de désamorcer les tensions, tout en réaffirmant sa légitimité.
"Je connais très bien les dossiers ultramarins", assure Jordan Bardella, après le tacle de Marine Le Pen pic.twitter.com/gNd6eN4Y5u
— BFMTV (@BFMTV) May 29, 2025
Mais derrière cette posture diplomatique, le président du RN a tout de même pris le soin de remettre les pendules à l’heure : "Je connais très bien les dossiers ultramarins", a-t-il précisé, insistant sur le fait que Marine Le Pen elle-même ne l’avait pas explicitement accusé d’incompétence. En appelant à replacer la phrase dans son contexte, Bardella évite l’escalade, tout en défendant avec assurance sa connaissance des enjeux néo-calédoniens.
Une passation de pouvoir de plus en plus incertaine
Depuis plusieurs mois, le rapport de force évolue au sein du Rassemblement national. Bien que Marine Le Pen conserve un poids symbolique considérable, Jordan Bardella s’impose progressivement comme la figure incontournable de l’extrême droite française. Dans les sondages, il fait jeu égal — voire mieux — que sa prédécesseure. Sa maîtrise des réseaux sociaux, sa jeunesse et son positionnement plus lissé séduisent un électorat élargi, moins attaché au nom Le Pen que par le passé.
Le contexte judiciaire de Marine Le Pen n’arrange rien : déclarée inéligible après une condamnation, elle a interjeté appel, espérant encore pouvoir se présenter à la présidentielle de 2027. Mais si la décision est confirmée, Jordan Bardella deviendrait naturellement le candidat du RN, une situation qui ne semble pas déranger l’intéressé, bien au contraire.
Une stratégie de communication bien rodée
En refusant de s’engager dans un affrontement direct avec Marine Le Pen, Jordan Bardella montre qu’il a compris les codes de la communication politique moderne. Là où une réaction trop virulente aurait pu envenimer la situation, il opte pour la maîtrise, la retenue, et glisse subtilement les éléments qui rétablissent sa crédibilité : son implication, son expertise, sa loyauté apparente.
Cette approche lui permet de garder le contrôle de son image, tout en laissant transparaître sa détermination à ne pas se laisser marginaliser dans le débat politique à venir. Bardella n’est plus seulement un “héritier” : il est un leader à part entière, capable de répondre, d’analyser, et de s’imposer face à celle qui l’a propulsé.
Le RN à la croisée des chemins
Cet échange entre les deux figures majeures du Rassemblement national marque peut-être un tournant. Si l’opposition reste feutrée, la ligne de fracture est bien réelle. Marine Le Pen tient à rappeler son expertise sur certains dossiers, comme celui de la Nouvelle-Calédonie, et sa place centrale dans le projet politique du parti. Jordan Bardella, lui, incarne le futur, la stratégie électorale gagnante, et la projection vers l’après-Le Pen.
Leur relation politique, longtemps basée sur la transmission et la fidélité, devient aujourd’hui plus complexe. Chacun défend sa légitimité, chacun revendique son rôle dans l’avenir du mouvement. Et à l’approche de 2027, la question de la candidature reste en suspens, tout comme celle de l’unité du parti.
Une rivalité naissante ou un malentendu passager ?
Difficile de savoir si cette séquence tendue marque le début d’un conflit ouvert ou s’il s’agit d’un simple malentendu médiatique. Ce qui est certain, c’est que la popularité croissante de Jordan Bardella et l’incertitude judiciaire qui plane sur Marine Le Pen fragilisent l’équilibre interne du RN.
Pour l’instant, chacun joue la carte de l’apaisement. Marine Le Pen assure qu’il n’y a “pas de compétition idiote entre eux”. Jordan Bardella se dit respectueux du travail de sa consœur et refuse de répondre aux “petites phrases”. Mais dans les faits, la concurrence silencieuse est bel et bien là, et le parti pourrait bien devoir choisir son camp si les ambitions devenaient incompatibles.
Découvrez maintenant "Nous ne sommes pas en couple" : Marine Le Pen recadre Jordan Bardella et prépare déjà 2027 et Donald Trump donne son avis sur la "gifle" de Brigitte Macron à Emmanuel Macron et fait le buzz.
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