Cinq minutes qui changent tout
Peut-on vraiment mesurer l’influence de la publicité sur les comportements alimentaires des enfants ? La réponse est oui — et les résultats sont alarmants. Une étude présentée récemment lors du Congrès européen sur l’obésité, à Malaga, démontre qu’une exposition de cinq minutes à des publicités pour des aliments gras, sucrés ou salés peut suffire à faire consommer jusqu’à 130 calories supplémentaires à un enfant en une seule journée.
Unsplash - Annie Spratt
L’équivalent d’une petite barre chocolatée en plus. Et ce, sans qu’aucune sensation de faim ne le justifie. Les chercheurs, menés par la professeure Emma Boyland de l’Université de Liverpool, ont observé 240 enfants âgés de 7 à 15 ans pour mesurer concrètement les effets d’un visionnage de publicités pour des produits alimentaires riches en graisses, en sel ou en sucre (appelés HFSS : High in Fat, Sugar and Salt).
Les résultats sont édifiants : après l’exposition aux spots publicitaires, les enfants ont mangé en moyenne 58 calories supplémentaires sous forme de biscuits ou de gâteaux, puis 72 calories de plus au repas suivant. Une hausse significative, qui pourrait avoir des effets cumulatifs graves si l’exposition est quotidienne.
Les enfants, cibles privilégiées du marketing alimentaire
Ce que cette étude vient confirmer, c’est ce que de nombreux professionnels de santé redoutent depuis longtemps : les enfants sont particulièrement vulnérables au marketing. Leur esprit critique est encore en développement, leur sens de la modération n’est pas formé, et leur rapport à la nourriture est en grande partie influencé par ce qu’ils voient, entendent ou associent à des moments de plaisir.
Selon l’étude, les enfants en surpoids ou obèses réagissent encore plus fortement à ces stimuli, consommant davantage que leurs camarades à IMC plus bas. Le piège est donc double : les enfants déjà à risque sont les plus influençables, ce qui les enferme dans un cercle vicieux de surconsommation et de sédentarité.
Une urgence de santé publique
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) tire la sonnette d’alarme depuis plus d’une décennie. En 2023 déjà, elle dénonçait le rôle du marketing numérique dans l’explosion de l’obésité infantile. Mais avec l’arrivée des réseaux sociaux, des influenceurs, des jeux mobiles et des dessins animés placardés sur les emballages, le danger s’est multiplié.
Dans 46 des 53 États membres européens de l’OMS, plus de la moitié de la population est en surpoids. Un enfant sur trois est concerné, et les chiffres grimpent. Limiter le temps devant la télé ne suffit plus. Aujourd’hui, un enfant est constamment exposé à de la publicité, même sans le vouloir : en scrollant sur YouTube, en jouant à un jeu gratuit, en regardant un influenceur faire la promotion d’un soda.
Des campagnes qui ne suffisent plus
En France, les messages préventifs comme « Mangez cinq fruits et légumes par jour » ou « Mangez, bougez » sont omniprésents depuis des années. Mais leur impact réel est de plus en plus limité, estiment les scientifiques. Face à une industrie publicitaire hyper puissante, ces slogans bienveillants ne font pas le poids.
Un collectif de chercheurs, de médecins et d’associations a publié une tribune dans Le Monde, appelant à des mesures politiques fortes : interdiction des pubs ciblant les enfants pour les produits ultra-transformés, encadrement légal strict, réglementation des placements de produits sur les réseaux sociaux, etc.
L’objectif : protéger les enfants d’un environnement toxique pour leur santé physique, mais aussi mentale. Car les conséquences de la malbouffe ne s’arrêtent pas à la prise de poids. Elles incluent la baisse de l’estime de soi, les troubles de l’image corporelle, les maladies métaboliques précoces, et parfois même des troubles alimentaires sévères.
Une solution simple et efficace ?
Le chiffre clé à retenir : 130 calories par jour. C’est ce que cinq minutes de publicité alimentaire peuvent générer chez un enfant. Sur une semaine, cela fait 910 calories, soit presque l’équivalent de deux repas complets. Sur un mois ? Plus de 3900 calories, de quoi favoriser une prise de poids progressive, insidieuse, mais réelle.
La solution semble alors simple : réduire l’exposition à ces contenus. Moins de pubs, moins d’envies. Moins d’envies, moins de calories superflues. C’est la logique défendue par les chercheurs et les experts en santé publique. Mais pour que cela fonctionne, il faut que les pouvoirs publics s’en emparent.
En résumé : des enfants en danger face à la malbouffe
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5 minutes de pub peuvent entraîner la consommation de 130 calories de plus chez un enfant.
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Ce sont les produits gras, sucrés et salés (HFSS) qui sont le plus souvent concernés.
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Les enfants en surpoids sont encore plus sensibles à ce type de marketing.
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Les campagnes de prévention actuelles ne suffisent plus, selon les experts.
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Une réglementation stricte est réclamée pour protéger les plus jeunes.
Alors que le surpoids infantile devient l’un des enjeux majeurs de santé publique en Europe, il est urgent d’agir. Limiter les publicités, renforcer l’éducation nutritionnelle, et surtout protéger nos enfants des logiques commerciales qui compromettent leur santé. Le débat est lancé. Il appartient désormais aux politiques de le transformer en action.
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