Mode

« Certains n’y survivront pas » : Shein arrive en magasin, vers la fin du prêt-à-porter français ?

05 octobre 2025 - 15 : 36
par Mylène Avec son implantation dans six magasins français, Shein fait trembler le prêt-à-porter hexagonal. Si l’ogre chinois menace déjà un secteur en crise, son arrivée physique pourrait aussi rebattre les cartes du marché.

C’est un séisme dans l’univers de la mode française. Le géant chinois Shein, symbole absolu de la fast fashion mondiale, s’apprête à franchir une nouvelle étape : après avoir conquis Internet, il débarque désormais en magasin physique. Une première mondiale pour la marque, qui ouvrira six points de vente en France, dont le BHV Marais à Paris et plusieurs Galeries Lafayette.

Certains n’y survivront pas : Shein arrive en magasin, vers la fin du prêt-à-porter français ?

Un geste qui, pour les observateurs, sonne comme une déclaration de guerre au secteur du prêt-à-porter français, déjà affaibli par des années de crise. Certains y voient la dernière estocade portée à un marché en grande difficulté.

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Un secteur déjà exsangue face à un concurrent redoutable

Le calendrier ne pouvait être plus symbolique. À peine deux jours après l’annonce de l’arrivée de Shein en boutique, la marque française IKKS a été placée en redressement judiciaire. Un épisode qui s’ajoute à une longue liste de faillites ou de restructurations : Camaïeu, San Marina, Jennyfer, GAP, Naf Naf, Kookaï ou encore Pimkie ont toutes vacillé ou disparu du paysage français.

Depuis trois ans, la mode tricolore s’effondre, emportée par une conjonction de facteurs : la hausse des coûts de production, la baisse du pouvoir d’achat, la pression écologique et surtout, la concurrence du e-commerce international. Et parmi les coupables souvent désignés, un nom revient toujours : Shein, le mastodonte chinois aux prix imbattables.

Avec 23 millions de consommateurs en France, la marque représenterait déjà 3 % des dépenses nationales en vêtements et chaussures. Une part colossale pour un acteur encore exclusivement digital — jusqu’à présent.

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L’ouverture de magasins : la fin du dernier rempart

« Ce n’est assurément pas une bonne nouvelle pour le secteur », prévient Pascale Hébel, économiste et spécialiste du comportement des consommateurs. En ouvrant des boutiques, Shein se dote d’une légitimité nouvelle : celle d’une marque désormais ancrée dans le paysage urbain français.

Jusqu’ici, les enseignes locales conservaient un atout majeur : la proximité physique avec les clients. Car malgré l’essor du commerce en ligne, 80 % des achats de vêtements se font encore en boutique. Ce lien concret, cette possibilité d’essayer avant d’acheter, constituait la dernière barrière face à la montée de la fast fashion numérique.

En s’implantant dans des lieux emblématiques comme les Galeries Lafayette, Shein balaie cet avantage d’un revers de manche. « C’est un coup de maître », admet Laurence Toy-Riont, Senior Manager chez Pixis Conseils. « L’entreprise va gagner en visibilité, en image et en crédibilité, notamment auprès des consommateurs qui n’osaient pas encore franchir le pas en ligne. »

Pour Pierre Talamon, président de la Fédération nationale de l’habillement (FNH), le constat est alarmant :

« C’est de la concurrence déloyale. Shein ne joue pas avec les mêmes règles : elle échappe à nos normes, reste opaque sur la qualité, la provenance ou les conditions de travail. Comment lutter dans ces conditions ? »

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Des craintes économiques… mais aussi symboliques

L’arrivée de Shein en boutique ne marque pas seulement un tournant commercial : elle a une portée culturelle et symbolique. La marque chinoise s’invite dans le cœur de la mode mondiale, à Paris, berceau du luxe et de la haute couture.

Pour les acteurs français, c’est une humiliation. Car la fast fashion, souvent pointée du doigt pour ses pratiques sociales et environnementales désastreuses, vient désormais marcher sur les plates-bandes d’un pays longtemps considéré comme la capitale du style et de l’élégance.

Et le moment ne pouvait être plus délicat : les marques françaises se battent déjà pour survivre à la crise. Face à un concurrent capable de produire 1.000 nouveaux modèles par jour, à des prix 20 à 40 % moins chers que la concurrence, le choc s’annonce brutal.

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Mais un pari risqué pour Shein

Pour autant, tout n’est pas gagné pour le géant chinois. Si sa présence en boutique va renforcer son image de marque, elle pourrait aussi affaiblir certains de ses avantages stratégiques.

D’abord, sa puissance repose sur un modèle de vente exclusivement en ligne, qui lui permet de tester des milliers de produits chaque jour et de les retirer instantanément en cas d’échec. Impossible de reproduire cette souplesse dans le monde physique.

Ensuite, l’ouverture de magasins la contraint à “jouer avec les mêmes règles que tout le monde”, rappelle Pascale Hébel. Fini l’anonymat du web : en boutique, les consommateurs pourront toucher, voir, comparer. Et là, la qualité réelle des produits risque d’être mise à l’épreuve.

« Shein, ce n’est quand même pas de la grande qualité, et ça se voit beaucoup plus en magasin », glisse Laurence Toy-Riont. La confrontation directe avec la réalité pourrait entacher l’image de la marque auprès d’un public plus exigeant.

Enfin, la polémique grandissante autour des conditions de production et de la pollution textile pourrait freiner son expansion. La marque arrive dans un contexte où les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux enjeux de durabilité et de consommation responsable.

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Une offensive qui oblige la mode française à se réinventer

Face à ce nouvel adversaire, la mode française n’a d’autre choix que de se réinventer. Selon les experts, les marques qui survivront seront celles capables de miser sur la différenciation : qualité, savoir-faire local, transparence, engagement écologique, ou encore service client personnalisé.

Car si Shein incarne la rapidité et le volume, elle ne peut pas rivaliser sur l’authenticité ni sur la valeur émotionnelle d’un produit bien fait. C’est là que les acteurs français peuvent encore tirer leur épingle du jeu.

« C’est violent, mais c’est aussi un électrochoc salutaire », estime Laurence Toy-Riont. « Comme Uber dans le transport, Shein bouleverse un système à bout de souffle. Certains n’y survivront pas, mais ceux qui s’adapteront seront transformés pour le mieux. »

Autrement dit, la fast fashion ne signe peut-être pas la mort de la mode française, mais sa métamorphose.

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En résumé

L’ouverture prochaine de six magasins Shein en France symbolise un tournant historique dans le monde du prêt-à-porter. Alors que les enseignes françaises peinent à se relever, l’arrivée du géant chinois sur le territoire national menace de rebattre les cartes d’un secteur déjà affaibli.

Mais cette implantation physique pourrait aussi se retourner contre Shein, qui devra désormais affronter les règles du commerce traditionnel et la méfiance croissante des consommateurs.

Reste à savoir si le public français choisira la vitesse et le prix… ou la qualité et la durabilité. Une chose est sûre : l’entrée de Shein dans le monde réel ne laissera personne indemne.

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Mylène
Je suis Mylène, blogueuse, beauty addict, Rédactrice en Chef du webzine So Busy Girls et maman de 2 petits bouts. Et fana de chocolat. Et de bons polars. On avait dit "courte description" ?! Ah oui, j'ai oublié de dire que j'étais très (très très) bavarde...!